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Beaujolais : Qui l’eût cru ?


Eaux ensorcelées, cailloux tueurs et trésors enfouis : au nord-ouest de Lyon, le «pays des pierres dorées» égrène ses légendes ancestrales de village en village. Un merveilleux voyage dans le temps à ponctuer de quelques verres de vin.

Beaujolais : Qui l’eût cru ?

Alors qu’il faisait un froid à pierre fendre en cette fin février, on a mis le cap au nord-ouest de Lyon, direction le Beaujolais des pierres dorées. Ici, dit-on, les eaux sont parfois ensorcelées (autant boire du vin alors), les esprits mutins et les trésors bien enfouis. Le pays des «pierres dorées», qui regroupe une quarantaine de communes, connut son heure de gloire avant-guerre, lorsque l’exploitation des carrières rivalisait avec celle de la vigne. C’est ce calcaire mêlé d’oxydes de fer qui donne depuis le Moyen Age cette teinte jaune orangée aux demeures de la région, dans le Lyonnais et jusqu’en Suisse. Les itinéraires sont infinis entre ces villages, et les légendes ancestrales, un joli prétexte pour explorer ce territoire vallonné à pied, à vélo, en moto, voire en… 2 CV.


Chazay-d’Azergues : le «Baboin» romain

Dominant la vallée de l’Azergues, Chazay fut un puissant fief médiéval. En 1364, un incendie menace de ravager le château. La vicomtesse et sa fille sont prisonnières des flammes. Théodore Sautefort, un saltimbanque déguisé d’une peau d’ours, brave le feu et sauve les femmes. Pour le remercier, le seigneur le fait chevalier et lui donne la main de la jeune Hermance qu’il a soustraite à la fournaise. Le «Baboin» - de «babou», un animal fantastique qui effrayait les enfants, ou de bast beoin, «celui qui se bat bien» - devient le protecteur de la cité et sa statue est fièrement dressée sur l’une des portes qui jalonnent les remparts.

Lorsqu’on s’en approche, on découvre avec surprise la silhouette… d’un soldat romain. Pour dénouer ce mystère, il faut remonter au XIXe siècle. En 1839, le conseil municipal a décidé de remplacer la vieille statue. Deux émissaires sont envoyés à Lyon. La halte dans les bouchons s’éternise ; les compères, ronds comme des queues de pelle, finissent par dégoter une cible en fonte, représentant un centurion, qu’ils négocient pour une misère. A leur retour, la bonne affaire est inaugurée en grande pompe, tout le monde faisant mine d’ignorer le peu de ressemblance avec le «Baboin» originel.


Saint-Jean-des-Vignes : les «pierres folles»

Sur les hauteurs de Saint-Jean, un alignement de roches était autrefois magique. Impossible de déplacer ces pierres sous lesquelles reposait un trésor, si ce n’est la nuit de Noël, entre le premier et le douzième coup de minuit. Elles dévalaient alors la pente pour s’abreuver dans l’Azergues et gare à celui, vite écrasé, qui se trouvait sur leur passage. C’est ce qui faillit arriver à Marcelline, la femme du bûcheron qui avait veillé pour se rendre à la messe. Elle entendit les pierres gémir de n’avoir pas toutes eu le temps de boire. La paysanne alla remplir un cruchon à la rivière pour leur apporter. En échange, les pierres promirent de lui dévoiler l’un de leurs trésors. Mais lorsque Marcelline allait s’en saisir, les pierres s’avancèrent pour l’étriller. Elle cria à la trahison, lâcha son cruchon qui rebondit sur les cailloux. Miracle, ils se brisèrent et finirent leur course dans le creux du vallon. Marcelline mit la main sur tous les trésors et depuis, le lieu-dit n’est plus maudit. C’est là qu’a été créé l’Espace pierres folles, qui regroupe un musée et un sentier géologiques, ainsi qu’un jardin botanique. C’est aussi le point de départ de deux randonnées accessibles de 7 kilomètres chacune. Pour trouver les Pierres folles, une fois dans Saint-Jean, prenez le chemin du Pressoir, en direction du cimetière.


Saint-Cyr-le-Chatoux : le gardien de la fontaine

Perché à 658 mètres au-dessus de Saint-Cyr-le-Chatoux, le Relais du Parasoir surplombe le vignoble, la vallée de la Saône et ses forêts. Ce «casse-croûte bar» est peuplé, en toute saison, de locaux comme de touristes - motards, marcheurs, cyclistes et même cavaliers. Ce point de passage entre les collines accueille depuis toujours une auberge, qui n’a pas changé de nom au cours des siècles. La légende raconte que des templiers de retour de croisade y firent une halte pour ripailler et se reposer. Profitant de l’ivresse de ses compagnons, l’un d’eux aurait noyé le butin commun dans la fontaine qui se trouve derrière le relais. A gauche du bassin, on distingue dans la roche un profil d’homme, qui fut désigné gardien des lieux. Certains y voient une gargouille ou une femme portant chapeau, d’autres pas grand-chose… Tout dépend du nombre de ballons de beaujolais-village qu’on vient d’aligner au comptoir.


Ville-sur-Jarnioux : le tumulus du Crey-du-Py

Quand on vient du Parasoir, sur la D19, il faut prendre à droite quand une vierge blanche fait face à une chapelle, avant même Ville-sur-Jarnioux en contrebas. Direction Saint-Clair, sur la D116 qui mène au chemin du Cret-du-Py. Ce lieu-dit serait lui aussi l’endroit d’un trésor. «De la Font-Pettone à la Pierre Coeli, il y a plus de finance que dans tout le royaume de France», clame le dicton. La Font-Pettone, c’est la source de Saint-Clair, et la pierre Coeli (la «pierre du ciel» en patois), c’est le nom donné au tertre que l’on distingue sur les hauts du hameau. Ce tumulus gaulois (on trouve aussi une tombe mérovingienne dans l’église) ferait l’objet, depuis des lustres, de bien des convoitises. Supposé recouvrir un tas d’or massif, il serait relié par un souterrain à l’une des maisons du village. Alors, dès qu’un voisin semblait s’enrichir trop vite, il était suspecté d’avoir mis la main dessus. Dans le doute, lorsque la commune céda ces terres en 1840, une demi-douzaine d’habitants se cotisèrent pour éviter que le Crey-du-Py ne devienne la propriété d’un seul. Il appartient toujours à plusieurs familles. Mais personne ne s’est jamais vanté de posséder l’un de ces écus carrés que frappaient les Gaulois…


Theizé : les miracles de Saint-Hippolyte

Pour dénicher la chapelle Saint-Hippolyte, «il faut aller fouiller les en-bas», dit une mamie croisée dans une rue de Theizé. On descend donc au pied du mont Bansillon en suivant la D338, avant de bifurquer à droite sur une petite route au milieu des ceps, qui finit en chemin devant la minuscule église. Réputé pour ses miracles, Hippolyte attirait autrefois en sa chapelle de nombreux pèlerins. Au point que les villageois d’à côté décidèrent de piquer la statue. Las, lorsqu’ils franchirent le ruisseau du Merloux, la sculpture s’envola de l’épaule de son porteur pour regagner sa place à côté de l’autel. Les envieux renoncèrent à cette évasion forcée et le saint patron (des matons - véridique) put enfin couler une retraite paisible à l’ombre des chênes centenaires. Si vous trouvez l’oratoire fermé, vous pourrez profiter de la table de pique-nique installée à côté.


Sources : http://www.liberation.fr/voyages/2017/03/03/beaujolais-qui-l-eut-cru_1553123


Maïté Darnault Envoyée spéciale dans le Beaujolais. Photo Bruno Amsellem. Divergence

#Beaujolais #Histoires

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